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ESPRIT LIBRE N°33
Octobre 2004
A QUOI BON LES OPINIONS ? par Georges Krassovsky
Lorsque je me propose
d’écrire un article sur un sujet déterminé j’ai toujours le soucis d’être
clair et Ceci étant bien établi, je pense qu’il est bon de s’entendre également sur le sens exact du mot « opinion ». Voici ce qu’en dit le Petit Robert : ( texte non disponible en Word ) La définition du Petit Larousse est bien plus courte. On y lit : ( texte non disponible en Word ) Revenons maintenant à nos quatre thèmes majeurs : la philosophie, la religion, la politique et la psychologie. A notre époque, les enfants en bas âge mis à part, tout le monde a son mot à dire à leurs sujets. Les opinions des uns sont pessimistes, celles des autres optimistes, les uns sont systématiquement « pour », les autres « contre » et il y a une multitude de groupes et de groupuscules qui s’organisent autour de ces opinions. En fait, c’est un véritable marécage de lieux communs, de généralisations abusives, d’affirmations et de négations toutes gratuites. Oui, « gratuites » car en principe cela ne coûte rien d’émettre une opinion. Aussi, des opinions fusent de partout ! Que sont, en effet, tous ces discours, conférences, colloques, symposium, émissions, toutes ces montagnes de livres « à thèse » sinon des étalages d’opinions ? Un véritable feu d’artifice ! Le mot « artifice » pouvant être pris ici dans les deux sens. Et évidemment la question se pose : d’où vient toute cette effervescence ? Quelle en est la cause ? Selon moi, l’explication en est toute simple : on croit que le fait d’avoir des opinions – dans les domaines dits « sérieux » - est quelque chose de valorisant et comme chacun cherche à se mettre en valeur…Il existe effectivement un véritable réservoir d’opinions « prêtes à penser » et rien n’est plus facile que de s’approprier telle ou telle et de la défendre ensuite « mordicus » comme si c’était la sienne. On finit d’ailleurs par s’identifier à ses opinions au point d’affirmer à la manière de Descartes : « J’ai des opinions, donc je suis » ! C’est rassurant et cela rend content de soi !
Dans le domaine des idées abstraites, les opinions sont particulièrement diverses. Certaines s’accordent (on dit alors que l’on est « du même bord ») mais la plupart du temps ces opinions sont contradictoires et risquent de mener à des « prises de bec » et à des ruptures. Je parle de tout cela en connaisseur car dès mon adolescence et jusqu’à un âge assez avancé, j’ai toujours eu des opinions bien tranchées sur un bon nombre de sujets que je qualifiais d’« intérêt public » et même de « vitaux ». Aussi à chaque nouvelle occasion, je ressortais les mêmes opinions et les mêmes arguments en leur faveur. Ma langue se transformait de plus en plus en « langue de bois » ! Je m’en rendais confusément compte, mais sans doute insuffisamment pour mettre un terme à cette opiniâtreté de mes opinions ! (1) Cela aurait sans doute pu durer indéfiniment si un beau jour je n’avais pas pris conscience, avec une extrême acuité, qu’en fait toutes les opinions m’agacent ! Surtout les miennes ! Quant à celles des autres, franchement, elles m’intéressent de moins en moins. Je les perçois la plupart du temps comme des dissertations, dénuées de toute chaleur humaine, même si certains ajoutent des trémolos à leur voix. Je les écoute par convenance et parfois acquiesce même à ce qu’ils disent, afin de couper court à toute discussion. En effet, à quoi bon discuter sur ce qui est et restera de toute façon, discutable, incertain ? A vrai dire, il n’y a que l’indiscutable qui m’intéresse réellement ! Et par « indiscutable » j’entends les sentiments que je ressens et aussi, bien sûr, mes sensations. Nul besoin d’opinion pour les ressentir et pour agir en conséquence. Je le précise pour que l’on n’imagine pas que quelqu’un qui n’a pas d’opinions est quelqu’un d’amorphe, d’apathique, d’indifférent. C’est, bien sûr quelqu’un qui ne cherche pas la quadrature du cercle, qui ne se gaspille plus à défendre des idéologies à base d’opinions et de croyances préfabriquées. Mais c’est quelqu’un qui est d’autant plus « empathique » et actif lorsqu’il s’agit d’empêcher les souffrances infligées aux êtres humains et aux animaux. Les guerres, la misère, les pollutions pour ce qui concerne les premiers, la vivisection, la chasse, l’élevage industriel pour les seconds. Là il ne s’agit pas d’opinion, ce sont des faits réels et qui suscitent l’indignation, elle aussi bien réelle ! Ma réponse à la question posée par le titre de cet article « A quoi bon les opinions ? » est donc : elles ne servent pas à grand chose et on peut très bien s’en passer ! Il se pourrait même qu’elles soient nocives dans la mesure où elles suscitent d’interminables discussions qui vont à l’encontre des actions concrètes. Paroles, paroles, paroles…bla, bla, bla…Bref, une dérive ! 1) J’aime ce jeu de mots. En fait c’est une tautologie étant donné que d’après le Petit Robert le mot « opiniâtreté » signifie : attachement obstiné à une opinion ! La vie est d’une diversité et d’une richesse prodigieuses ! Toute opinion à caractère dogmatique qui s’y superpose est comme un cheveu sur la soupe. La soupe est bonne, mais le cheveu est de trop ! Surtout si on le coupe en quatre, ce qui est souvent le cas dans les discussions, dites sérieuses et où l’on se prend au sérieux ! Cessons donc d’attacher de l’importance à nos sacro-saintes opinions, ainsi qu’à celles que colportent les autres. Jouons, amusons-nous avec, comme si c’était des balles de ping-pong. La légèreté est une vertu ! Une vertu joyeuse ! N.B – Je m’attends bien sûr à ce que quelques lecteurs me disent ou m’écrivent : « Et vous-même que faites-vous, sinon exprimer votre opinion sur les opinions ? » Eh oui ! cela m’arrive encore de temps en temps de donner mon avis. Des rechutes ! Mais de moins en moins fréquentes ! Elles n’ont d’ailleurs jamais eu d’incidence fâcheuse sur mes relations. Ces dernières étaient souvent excellentes avec les personnes dont je ne partageais pas du tout les opinions et, au contraire, il m’arrivait parfois d’être « en froid » avec celles qui avaient les mêmes idées que moi. Surtout s’il s’agissait des « dominants » que ma manière d’être trop indépendante indisposait. C’est l’ensemble de ces observations et constatations qui m’a donné envie d’écrire cet article. Je serai ravi que vous me donniez votre opinion à son sujet et qu’importe qu’elle soit bonne ou mauvaise, positive ou négative !
ENCORE SUR LE MEME SUJET
Il arrive parfois qu’après avoir écrit un article on ait l’esprit qui continue sur sa lancée et fil vient une foison d’idées qui vont dans le même sens. Il est toutefois impossible de les introduire dans le texte de l’article en question car cela briserait l’enchaînement des phrases. On note donc des bribes en espérant que le lecteur s’y retrouvera. * Je n’ai pas d’opinions, je fais des constatations et exprime des souhaits. * On n’émet pas une opinion en disant qu’on aime les cerises ou que l’on a horreur de toute violence. C’est une question de goût ou de dégoût … * La nature semble avoir des lois, mais tout ce qui est humain est mouvant et incertain. * La meilleure manière de vivre consiste à être occupé sans être préoccupé de quoi que ce soit. * Les opinions sont d’autant plus lourdes à porter s’il faut de surcroît les défendre ! * Je n’enseigne rien, si ce n’est la méfiance envers tous les enseignements. * A chaque opinion on peut opposer une opinion contraire, mais elles ne s’annulent pas pour autant, elles s’éternisent… * A l’issus d’un sondage de l’opinion publique il y a toujours un petit nombre de « sans opinion ». Cela redonne confiance dans l’espèce humaine ! * Extraits des dialogues :
— Je le trouve formidable! Malgré son âge avancé il ne se prend pas pour un sage ni pour un philosophe ! — C’est parce qu’il est intelligent !
— Que serait une société de citoyens sans opinion ? — Je n’ai pas d’opinion à ce sujet.
— J’ai changé d’opinion. — Ca ne change rien !
* Vous tenez à vos opinions ? Gardez-les, je vous en prie !
* La fameuse
« noosphère » est saturée d’opinions. On y étouffe! Vive l’atmosphère ! LES VEGETARIENS SOLIDAIRES Tant qu’il y aura des abattoirs, il y aura des guerres. ( Lev Tolstoï ) Je tiens à remercier mes amis de la revue ALLIANCE VEGETARIENNE et tout particulièrement son directeur, mon ami André MERY d’avoir publié dans le N° 177 de septembre 2004 un excellent article consacré aux actions que j’ai menées - depuis une cinquantaine d’années - en faveur de la paix, du désarmement, de la nature et des animaux. Etant donné mon égocentrisme cet article m’a évidemment fait bien plaisir. Cela vous étonne que je me dise égocentrique? Mais tout le monde l’est ! Bien que ceux qui l’avouent sont assez rares, l’égocentrisme étant plutôt mal vu. Bien à tort, étant donné qu’un égocentrique n’est pas forcément quelqu’un de borné; l’intérêt qu’il porte à sa personne ne l’empêche pas d’être attentif et bienveillant envers les autres. Il est, par conséquent, absurde d’opposer systématiquement les tendances égoïstes et les tendances altruistes ( l’égocentrisme et l’empathie) alors qu’en fait elles sont complémentaires. C’est sans doute même ce qui caractérise le mieux les êtres humains normaux, sains, équilibrés. Or j’en ai rencontré beaucoup parmi les végétariens. Aussi il est permis de se demander si la propagation du végétarisme ne rendra pas les relations humaines plus harmonieuses ? Aussi bien entre les individus qu’entre les peuples. Nous en sommes, certes, encore loin mais on peut toujours rêver, en se rappelant du magnifique mot d’Helder Camara: « Quand on rêve seul ce n’est qu’un rêve, quand on rêve à plusieurs cela devient réalité » - Les végétariens sont de plus en plus nombreux et nous faisons tous le même rêve !
Adresse pour la correspondance : ALLIANCE VEGETARIENNE : 11 bis, rue Gallier, 77390 Chaumes-sur-Brie. Le prix du numéro : 3 € N.B.- Un très bon article sur les avantages du végétarisme a paru dans le N°62 de novembre 2004 de la revue VOTRE SANTE, 44 bd de Magenta, 75010 Paris. Il dénonce les huit mensonges sur la nutrition. Le prix du numéro : 6 €
ENTRE NOUS C’est-à-dire entre mes lecteurs et moi. ESPRIT LIBRE est le titre du trimestriel que vous êtes en train de lire. Je n’appartiens à aucune association et je n’ai pas envie d’en créer une. Je n’ai donc pas « d’adhérents ». Depuis quelques temps je demande même que l’on ne s’abonne plus à ESPRIT LIBRE. Je n’ai donc pas d’« abonnés ». En fait il n’y a que les « correspondant-e-s » qui m’intéressent. J’entends par là ceux et celles avec qui je corresponds et aussi ceux et celles dont la tournure d’esprit correspond à la mienne. « Qui se ressemble s’assemble »! Pourvu que ce ne soit pas pour « s’organiser »! Nous formons donc un groupe disséminé et informel dont je ne suis qu’un maillon. J ‘assume en principe les frais d’impression et d’expédition de chaque numéro. Les personnes qui souhaiteraient y participer peuvent le faire par chèque ou en timbres-poste, mais c’est facultatif. Il y a un an j’avais demandé à mes aimables correspondant-e-s de m’envoyer à chaque parution d’E.L. une enveloppe affranchie, portant leur nom et adresse. Je demande maintenant de ne plus le faire car, au lieu de m’aider, cela me complique au contraire l’existence.. Certains lecteurs oublient de m’adresser ces enveloppes ( mais il faut que je me souviennent d’eux!). D’autres m’envoient d’emblée un paquet d’enveloppes qui m’embarrassent et que j’ai ensuite du mal à retrouver. Bref cela va à l’encontre de mon besoin croissant de simplicité et d’insouciance. C’est sans doute aussi la raison qui me fait garder mes distances vis-à-vis d’internet. Tous ces « points org » et « points com » ne m’attirent point ! Adresse pour la correspondance : Georges Krassovsky, ESPRIT LIBRE, B.P. 164, 75664 PARIS CEDEX 14
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Mise à jour le 18 nov 2004 / RR |